Les négociations sur la réforme des retraites se poursuivent chaque jeudi, mais les représentants des salariés rejettent l’idée de retarder l’âge de départ à la retraite pour financer les dépenses de défense annoncées par Emmanuel Macron. Comment financer l’effort de guerre face au désengagement américain en Ukraine ? Pour continuer à soutenir Kiev, le gouvernement français cherche des milliards d’euros pour ses dépenses militaires. Cependant, ce débat sur l’économie de guerre interfère avec les discussions sur les retraites, qui réunissent syndicats et patronat chaque semaine.
Dans la revue spécialisée Telos, le président du Conseil d’orientation des retraites (COR) remet en question la pertinence de ces débats dans le contexte d’augmentation des investissements militaires. Face aux efforts de guerre, Gilbert Cette considère les discussions sur l’âge légal de départ à la retraite comme dérisoires. Il appelle les syndicats et le patronat à ne pas ignorer la gravité de la situation internationale et militaire dans leurs discussions. Pourtant, l’ordre du jour de ce conclave reste inchangé : cette semaine, par exemple, des débats sur l’âge et la durée de cotisation. Pour Gilbert Cette, ces discussions semblent déconnectées de l’effort de guerre demandé par le gouvernement.
Le président du COR affirme que « l’entrée dans une économie de guerre rendra secondaires, sinon dérisoires, les débats actuels » sur l’âge de départ à la retraite. Il suggère même de réfléchir à un âge de départ au-delà de 64 ans. Un argument qui plaît au Medef : son président, Patrick Martin, continue de plaider pour reculer l’âge de départ, au-delà de la réforme de 2023, afin d’adapter l’économie au défi du réarmement de la France.
Les organisations syndicales s’opposent fermement à cette vision. Pas question de sacrifier les droits sociaux et le financement du régime des retraites à un effort de guerre, déclarent les syndicats d’une même voix. La prise de position de Gilbert Cette agace particulièrement la CGT. « Il y a toujours une bonne raison pour repousser l’âge de départ », dénonce Denis Gravouil, négociateur CGT au conclave. « C’est scandaleux de remettre en cause la concertation et de plaider pour une nouvelle réforme des retraites sous prétexte d’effort de guerre. »
La CFDT partage cet avis et accuse Gilbert Cette de manquer de neutralité. Sur RTL, sa secrétaire générale, Marylise Léon, refuse d’opposer la défense au social et appelle à une conférence sur les finances publiques pour discuter ensemble des financements possibles de cet effort de guerre. Les représentants des salariés ont déjà des propositions. « On va encore faire financer cet effort de guerre par une seule catégorie de la population, les actifs », dénonce Cyril Chabanier, leader de la CFTC. « Et on ne parle pas d’un effort équitable et partagé. Quid de l’effort de l’État dans une meilleure gestion de ses finances publiques ? Quid de l’effort des entreprises ? »
La CFE-CGC estime qu’il faut renforcer notre souveraineté dans l’industrie de la défense en formant les jeunes aux métiers des industries métallurgiques ou du nucléaire. Sa représentante au conclave, Christelle Thieffinne, assure que « nous allons avoir besoin de salariés qualifiés et de chercheurs ».